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![]() Il est né près de Bruxelles le 31 décembre 1514. La maison familiale est
située à proximité du lieu où se déroulent les exécutions. Vésale commence ses études à l'université de Louvain. A dix-huit ans sous le règne de François Ier il se rend à Montpellier puis à Paris où il reçoit l'enseignement de Jacques Dubois dit Sylvius ainsi que du florentin Guido Guidi dit Vidius, alors Professeur au Collège de France. Vésale préfère étudier les os de sa propre initiative en fréquentant assidûment les cimetières. C'est en tant que "contestataire" de ses précurseurs qu'il sera d'abord connu, décrié, voire insulté (Sylvius, son ancien professeur, fut un de ses adversaires les plus acharnés, le traitera d' "arriviste" lorsque paraîtra la "Fabrica"), puis finalement honoré. Après trois ans d'études à Paris, la guerre entre François Ier et Charles-Quint le contraint à quitter Paris. Il rejoint l'armée de l'empereur d'Allemagne. Puis soutient sa thèse de doctorat à Louvain en 1537. Attiré par l'Italie du Nord où il espère trouver un climat plus compréhensif, il devient docteur de l'université de Padoue la même année et est nommé lecteur en chirurgie et anatomie. Il inaugure cette charge par une démonstration anatomique sur le cadavre d'un jeune homme de 18 ans. Il dissèque aussi bien des corps humains que des corps d'animaux.
Au sortir de la longue nuit moyenâgeuse où la tradition de l'Église
toute puissante, comme la tradition coranique interdisait formellement la
dissection d'un corps humain, on ne peut s'étonner que les connaissances
anatomiques aient peu progressé depuis Galien qui avait du se contenter des
cadavres de divers animaux, de singes en particuliers, et qu'une certaine
similitude avec l'homme conduit à une extrapolation rapide et néfaste. Malgré l'accord des Papes Sixte IV, puis Clément VII, l'Inquisition
continua de faire peser et payer sa réprobation. Grotius, au XVIIe siècle,
surnommé "le père du Droit des gens" parlait encore de "Profanations
Sacrilèges et cruautés inutiles exercées par les vivants sur les
morts". Il entreprit en effet de réviser, corriger ou réfuter les affirmations de Galien, considérées comme définitives depuis un millénaire. Cette audace fera de lui non le maître incontesté de l'anatomie, car il commit à son tour bien des erreurs, mais le chercheur dont l'intuition, la méthode, l'ambition toute au service de la vérité scientifique, le courage, conduiront ses successeurs à repenser, reconstruire les bases de l'anatomie, et arriver peu à peu à sa vérité définitive. Il note tout ce que l'observation personnelle lui permet de découvrir, il fait graver six planches sur feuilles volantes les "Tabulae anatomicae sex"qui seront plagiées dès leur impression à Venise en 1538. Dès 1539, il commence à obtenir un approvisionnement régulier en corps: le juge Marcantonio met à sa disposition les cadavres de criminels exécutés et va même jusqu'à retarder les exécutions des condamnés à mort en fonction des besoins de son ami. Il réalise ainsi des dissections publiques qui obtiennent un aussi grand succès que les exécutions. Il emmène par ailleurs les étudiants parfaire leur formation au chevet des malades et les incite à la rédaction de fiches individuelles. Ce travail permet à Vésale de démontrer clairement que les descriptions anatomiques réalisées par Galien correspondaient aux corps de singe et non d'homme. Vésale occupe quelques temps une chaire à Pise, Bologne, Pavie, à la demande de Cosme Ier de Médicis qui lui propose "autant de cadavres qu'il voudra". À partir de ses propres dissections de cadavres humains, il publie à Bâle
en 1543, sous la direction de son ami Johan Oporinus, un impressionnant traité
d'anatomie, "De Humani Corporis Fabrica" (7 vol.), pour
lequel Vésale attache autant d'importance au texte qu'à l'iconographie dont
il fit graver soigneusement les planches à Venise par le Titien et son élève
Jean van Calcar. Depuis l'Antiquité, la reproduction du nu était frappé d'interdit. Mais
la Renaissance va révéler l'esthétique et la vérité du corps humain, lui
redonner sa valeur et sa place dans l'œuvre d'art. D'où l'intérêt que les
artistes de cette époque vont porter à l'anatomie, devenant ainsi les
collaborateurs géniaux des savants. En 1546, écœuré par la meute des galénistes irréductibles qui
comptaient nombre d'anatomistes contemporains, il abandonne sa carrière de
chercheur et de professeur, il brûle ses manuscrits et quitte Padoue pour
devenir le premier médecin personnel de Charles Quint, rejoignant ainsi la
longue tradition de service à l'Empire de sa famille. On le voit dès lors à
Bâle, Ratisbonne, Bruxelles et Madrid où il compte parmi les premiers
personnages de la Cour. En 1556, le roi abdique, nomme Vésale comte palatin, au service de son fils Philippe II d'Espagne, réparant ainsi ce que le père de Vésale, fils naturel, n'avait pu obtenir. Réformateur de l'enseignement, il fut aussi un thérapeute et un chirurgien, et ces qualités firent de lui un médecin au sens le plus complet du terme. Il est le premier à porter le diagnostic d'anévrysme de l'aorte. C'est désormais un médecin prospère appelé au chevet des plus grands, comme en 1559 par exemple à celui d'Henri II, grièvement blessé à l'œil par Montgomery au cours d'un tournoi. Il fait à cette occasion la connaissance d' Ambroise Paré. Cette rencontre l'emplit de mélancolie. Les deux médecins n'hésitèrent pas à faire décapiter en hâte quelques prisonniers du Châtelet, et pendant quatre jours "anatomisèrent" leurs têtes "après les avoir blessées de la manière que le roi l'avait été". Comme l'explique Chapelain, premier médecin du roi: "on cognait avec force le tronçon de lance contre les dites têtes pour essayer de reconstituer la royale blessure..." Peut-être la science bénéficia-t-elle quelque peu de cette expérience, mais le roi n'en fut pas sauvé pour autant puisqu'il mourut sans qu'aucun des deux chirurgiens n'aient osé tenter l'opération. En 1563, après une vie de recherche, de combats, de polémiques, de voyages et de récompenses honorifiques, il quitte Madrid et la Cour d'Espagne, dans des circonstances qui restent indéterminées, pour faire avec l'accord du roi et l'appui du vénitien Malatesta un pèlerinage à Jérusalem. La Légende s'est longtemps répandue qu'il s'agissait d'un voyage expiatoire pour avoir disséqué un gentilhomme espagnol encore vivant, pour lequel il avait été accusé de meurtre et que sans l'intervention de Philippe II, cette accusation lui eût valu la condamnation à mort. Au retour de Terre Sainte, le vaisseau qui le ramène vers l'Italie "mère de tous les génies" fait naufrage. Vésale meurt d'épuisement, quelque part le long de la côte grecque sur l'île de Zante, le deux octobre 1564. On ne saura jamais où il est enterré. Vésale est le plus grand anatomiste de la
Renaissance, l'un des premiers à pratiquer la dissection du corps humain,
dont les observations permirent de corriger des notions erronées qui prévalaient
depuis Galien. |