1
Problématique
L'extravasation (incident de perfusion)
est une complication non exceptionnelle
(0,04 à 0,9 %) des injections
intra-veineuses de produit de contraste.
Elle peut faire suite à une blessure de
la veine lors de la pose du matériel d'injection,
mais également résulter d'une rupture
d'une paroi veineuse du fait de
l'hyper-pression. Cette rupture survient
dans la zone où est placé le matériel
d'injection, ou en aval, à proximité.
Généralement bien tolérée, une
extravasation peut être source de douleur, voire
de séquelles, et perturber le
déroulement de l'examen. Cette complication fait
partie des risques inhérents à l'examen
dont le patient doit être prévenu.
Facteurs de risque et/ou
de gravité
Liés au patient
Ages extrêmes de la vie.
Troubles de la conscience.
Facteurs spécifiques : troubles de la vascularisation
artérielle, du drainage
veineux ou lymphatique, troubles
trophiques.
athérosclérose diffuse, syndrome de
Raynaud, vascularite, diabète sucré,
antécédent de phlébite, atteinte
lymphatique, troubles trophiques, radiothérapie
ou chirurgie préalable sur le segment
concerné, stigmates de
ponctions répétées …
Liés au site d'injection
Topographie : dos de la main, poignet, dos du pied, cheville
… (faible abondance
du tissu sous-cutané).
Ancienneté de la perfusion (>24 heures).
Injection en amont d'un site de ponction récent.
Pansements masquant le site d'injection, retardant le
diagnostic d'extravasation.
Fiche de recommandation
pour la pratique clinique
Prévention de l'extravasation
Version 1 / 16 décembre 2004
2
Liés à la technique d'injection
Utilisation d'une aiguille plutôt que d'un cathéter.
Utilisation d'un injecteur automatique.
Liés au produit de contraste
Type de produit utilisé : hyperosmolalité.
Quantité élevée du produit de contraste ayant pu diffuser.
Gravité reconnue si :
Quantité supérieure à 30 cc de produit de contraste ionique
d'osmolalité
élevée, ou supérieure à 100 cc de
produit non-ionique de basse osmolalité.
Faible abondance du tissu sous-cutané.
Atteinte vasculaire ou troubles trophiques.
Conduite pratique
Avant : Prévenir l'extravasation
et limiter son importance
La voie veineuse
Eviter d'utiliser une voie veineuse déjà en place.
Recourir systématiquement à un cathéter court en adaptant le
débit
au calibre utilisé.
Privilégier une veine du pli du coude ; n'utiliser la main ou
le pied
que sur avis express du radiologue et
sous réserve d'une surveillance
toute particulière de l'injection.
Eviter toute compression du membre perfusé (appui-bras,
brassard de
pression artérielle, …)
Vérifier la qualité du cathétérisme par une injection test.
En cas de facteur de risque, utiliser un produit à faible
charge osmotique.
Prévenir le patient du risque et lui demander de se manifester
en cas de douleur
(mais savoir qu'une extravasation, même
importante, peut être indolore et
que la sensation de tension et/ou de
douleur peut n'apparaître que secondairement).
Surveiller ++ le début d'injection avant le passage des rayons
X (surveillance
visuelle et tactile).
cirtaci - Fiche de
recommandation pour la pratique clinique
Prévention de l'extravasation
3
En cas d'extravasation
Mesures immédiates
Arrêt immédiat de l'injection en cas de plainte du patient ou
de perception
d'un problème.
Traitement médical systématique
Tentative d'aspiration du produit extravasé par le cathéter
d'abord laissé
en place, puis, après l'avoir enlevé,
expression cutanée.
Surélévation du membre concerné pendant les trois heures
suivantes,
en cas de gravité potentielle.
Hypothermie locale par application de glace (pendant au moins
20
minutes ; puis toutes les heures pendant
6 heures) sans contact direct
entre la glace et le membre (envelopper
la glace dans un linge).
A noter que la hyaluronidase,
antérieurement préconisée, n'est plus disponible.
Le pansement alcoolisé n'a quant à lui
pas prouvé son efficacité.
Mesures différées
Evaluation de la gravité potentielle.
Estimation du volume injecté (au vu de la quantité restante
dans la seringue).
Estimation de l'étendue et de la localisation de
l'extravasation par la pratique
de clichés de membre.
Recherche de signes de mauvaise tolérance par un examen
clinique, vasculaire
et neurologique.
Aspect cartonné ou phlycténulaire de la peau.
Oedème important.
Troubles de la perfusion distale (syndrome des loges) :
paresthésies,
renforcement des douleurs segmentaires,
hypoesthésie, diminution
de la force musculaire, diminution des
pouls.
Ces signes imposent le recours à un avis
chirurgical spécialisé. La plupart
des chirurgiens plasticiens pensent
toutefois que la majorité des extravasations
guérissent sans nécessiter de chirurgie
et recommandent globalement
une approche conservatoire. Ceci est
d'ailleurs d'autant plus vrai que
le produit de contraste utilisé est un
produit à charge osmotique limitée. Il
reste que des interventions (fasciectomie)
ont pu être proposées sur des
syndromes des loges et/ou des
extravasations importantes, mais aucune
étude ne permet de valider une telle
approche et ce recours doit rester
exceptionnel.
cirtaci - Fiche de
recommandation pour la pratique clinique
Prévention de l'extravasation
4
Information du patient quant aux signes de mauvaise tolérance
imposant
une prise en charge immédiate.
En cas de gravité, contrôle médical systématique le
lendemain pour
s'assurer d'une évolution favorable.
Il faut néanmoins savoir qu'il est
difficile au stade initial d'évaluer la
sévérité et le pronostic.
Signalement de l'extravasation dans le compte-rendu et auprès
du médecin
traitant.
Bibliographie
1. Contrast
Media Safety Committee Of The European Society Of Urogenital Radiology.
Contrast
medium extravasation injury: guidelines
for prevention and management. Bellin MF, Jakobsen JA,
Tomassin I, Thomsen HS, Morcos SK. Eur
Radiol. 2002 Nov;12(11):2807-12
2. Manual
on Contrast Media, Version 5.0, American College of Radiology
3. Cutaneous
ulceration due to contrast extravasation. Experimental assessment of
injury and potential
antidotes. Elam EA, Dorr RT, Lagel KE,
Pond GD. Invest Radiol 1991;26:13-6
4. Extravasation
of Radiographic Contrast Material: Recognition, Prevention, and
Treatment. Cohan
RH, Ellis JH, Gardner WL . Radiology
1996; 200:593-604
5. Experimental
Tissue Damage after Subcutaneous Injection of Water soluble Contrast
Media.
K Seung Hyup, P Jae Hyung, K Yong Il, K
Chu-Wan, H Man Chung. Invest Radiolog, 1990, 25 : 678-85
cirtaci - Fiche de
recommandation pour la pratique clinique
Prévention de l'extravasation
Comité Interdisciplinaire de Recherche
et de
Travail sur les Agents de Contraste en
Imagerie
Société Française de Radiologie
|