Philippe Pinel                            

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Philippe PINEL
1745-1826
Médecin aliéniste et philosophe français

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Philippe PINEL est né dans un petit village du sud de la France à Jonquières près de Castres dans le Tarn, le 20 avril 1745, dans une famille de médecins.

Il a fait ses études classique au collège de Lavaur puis des études théologiques à l'Esquille à Toulouse.
Il se destinait tout d'abord à une carrière religieuse, il délaisse la soutane pour s'orienter d'abord vers les mathématiques puis vers la médecine qu'il étudie à la Faculté de Toulouse dont il sort diplômé à l'âge de 28 ans en décembre 1773.

Il fut l'élève de Barthez en médecine et le disciple de Condillac en philosophie. Il se perfectionne en médecine à Montpellier où il fait connaissance de Chaptal et s'adonne - pour vivre - à des petits travaux de rédaction de mémoires qu'il vendait à des étudiants peu scrupuleux.

En 1778 il se rend à Paris avec l'espoir de faire carrière. Ses débuts dans la capitale sont assez lents et modestes, il survit en donnant des leçons particulières de mathématiques et en rédigeant des articles médicaux de circonstances et des travaux de traductions. C'est ainsi qu'en 1784 il assure la Direction de la "Gazette de Santé" que lui avait laissé J. Paulet.
Il devient l'ami de Cabanis, d'Alibert et de Thouret et fréquente le salon de Madame Helvetius.

Les mondanités et les rencontres

Le salon d’Anne-Catherine de Ligniville d’Autricourt (1719-1800), veuve de C. Adrien Helvétius (1715-1771) et arrière petite-nièce de Jacques Callot, à Auteuil, était installé dans une maison ayant appartenu au célèbre pastelliste Quentin de la Tour. Pendant trente ans ce salon fut fréquenté par deux générations de causeurs, philosophes et encyclopédistes.
La première génération, réformiste et pré-révolutionnaire; celle des “États généraux de l’esprit humain” comprenait: d’Alembert, Condillac, Malhesherbes, Chamfort, Morrillet, Garat, Dupaty, Jefferson, Benjamin Franklin, Roussel, Roucher etc… Turgot y introduisit Cabanis auquel Franklin donna sa canne et son épée.
La seconde génération y eut ses entrées lorsque la Révolution était déjà commencée. Elle comptait Vicq d’Azyr, A. Petit, Boyer, Thouret, Ginguené, Andrieux, Garat, Th. Lagarde, Rousse, Volney, Lareveillère, Daunou, Laromiguière, Thurot et Destutt de Tracy. Fermé pendant la Terreur, le salon d’Auteuil accueillit après le 9 Thermidor an II (27 juillet 1794): Pinel, Desgenettes, Diéyès, Lucien Bonaparte et ultérieurement, Gallois, Pariset, Fauriel, Richerand, Alibert, Dupuytren, Récamier et Bayle.

Son intérêt pour la psychiatrie ne commença pas avant les années 1780, vers l'âge de 40 ans, afin de soigner un de ses amis atteint de manie aiguë. Au début il n'exerçait pas la médecine de clientèle. Ce n'est que vers 1786 qu'il traita quelques malades mentaux dans le cabinet de Belhomme situé rue de Charonne et réservé à des malades fortunés.

En 1787, Pinel présente à l'Académie des Sciences un mémoire sur l'application des mathématiques à l'étude du corps humain.

La Révolution avait interrompu momentanément la carrière de certains de ses amis, et fit cesser la timidité et l'absence de prétention de Pinel envers les situations prééminentes. Il s'engagea avec enthousiasme en faveur du mouvement révolutionnaire de 1789. Il devint plus modéré au moment de la Terreur et accepta un travail à l'hospice de Bicêtre sur la recommandation de Thouret (premier doyen de la nouvelle Faculté de Médecine)
Dès 1791, il attire l'attention sur lui par un mémoire qu'il adresse à l'Académie de Chirurgie, sur le traitement des aliénés, aussi quand la Constituante décida de transformer Bicêtre, c'est Pinel qui fut tout naturellement désigné
Le 25 août 1793 par décret de le Convention, il est nommé médecin-chef de l'Asile de Bicêtre.

Bicêtre était un bien singulier établissement où les aliénés voisinaient avec les forçats et avec les prostituées depuis l'édit royal de 1656, date ce que l'on a appelé "le grand enfermement". Cet enfermement n'a alors aucune visée médicale, mais fait fonction de régulateur social, moral et économique. Les "fous" y étaient entassés dans des loges basses et humides sans air et sans lumière, où ils croupissaient sur un véritable fumier; on ne faisait aucune différence entre un "fou" et un criminel.

Pinel avait un certain respect pour les guérisseurs non qualifiés officiellement, il pensait que ceux-ci pouvaient amener "quelques progrès à la doctrine de l'aliénation mentale".

Pour instituer son traitement moral (on dirait aujourd'hui psychologique), Pinel s'inspirait des idées de Jean-Baptiste Pussin, un surveillant des aliénés dont il observa attentivement le travail. Ces agités, Pussin les suit, on n'ose pas dire les soigne, avec une certaine humanité que remarquera Pinel qui restera médecin à Bicêtre de 1793 à 1795. Les principes du traitement moral ont donc leurs racines dans les observations populaires.

Jean-Baptiste Pussin, "chef de la police intérieure des loges, gouverneur des sous employés" osa le premier "le geste inaugurateur". Il s'agit, et cela durera jusqu'à la découverte des neuroleptiques, de conditionner les malades par un système de punitions / récompenses, de bons malades / mauvais malades. Ce mode de fonctionnement attire inévitablement une contre violence des patients.

C'est dans ce lieu dantesque qu'est Bicêtre que Pinel conçoit, avec son surveillant Jean-Baptiste Pussin, le projet de l'abolition des chaînes que se dernier appliquait donc déjà. Au premier abord il se contenta d'observations prudentes laissant au gardien Jean-Baptiste Pussin les initiatives thérapeutiques et administratives les plus nombreuses.

En décembre 1794, Pinel est nommé Professeur d'Hygiène puis de Médecine interne, dans la nouvelle École de Santé de Paris. Parmi ses contemporains il était connu et admiré comme médecin plus que comme psychiatre. Pourtant Pinel est le créateur de la première école psychiatrique française.

   

Le 13 mai 1795 (24 floréal an III), Pinel est nommé à la Salpétrière où les folles ne sont pas mieux traitées, il opère de la même façon et avec le même succès.
Là, comme son surveillant Pussin, il applique le projet de l'abolition des chaînes, geste spectaculaire et décisif pour délivrer les aliénés, malgré les réticences de Gouthon, Pinel fait supprimer "l'usage gothique du fer" à Bicêtre et à la Salpétrière et traita les aliénés comme de simples malades. En cas de crise on leur passe simplement la camisole de force.

Dès lors le calme succède à la fureur.

En suivant Pussin il opéra une véritable révolution dans le traitement des aliénés, en substituant aux chaînes et aux brutalités un régime de douceur et d'humanité complétant l'œuvre de charité chrétienne entreprise par Saint Vincent de Paul deux siècles plus tôt, et ouvrant une ère nouvelle dans les rapports des malades mentaux et de leur encadrement médical.

Avant tout, Pinel figure dans l'histoire de la médecine comme un clinicien et un nosographe (la description des maladies) - et non un nosologue, qui classe - qui constitue le centre de sa pensée médicale. Dans sa "Nosographie Philosophique ou Méthode de l'analyse appliquée à la médecine" publiée en 1798, inspirée par Cullen, il décrit les maladies moins par leurs symptômes que par les organes lésés. Il s'appuyait ainsi sur la méthode analytique décrite par les naturalistes et par les anatomistes comparés. Pour les maladies mentales Pinel suit l'ordre établit par Cullen en Écosse pour introduire de l'ordre en Pathologie; cette nosographie est devenue une Bible de l'école Parisienne pendant vingt ans et malgré le succès considérable de ce travail, si Pinel est resté célèbre, il le doit à sa grande réforme de la médecine mentale qui a fait de lui un bienfaiteur de l'humanité.

D'ailleurs il présenta une classification très différente des "folies" ou vésanies dans son célèbre "Traité médico-philosophique sur l'aliénation mentale", dont la première édition en 1801 était centrée sur la manie qui pour Pinel était le modèle de maladie mentale le plus typique et le plus fréquent.
Il applique aux troubles mentaux la méthode analytique qu'il estimait à juste titre fondamentale dans tous les domaines de la médecine: chaque symptôme anormal doit conduire à la découverte d'une cause organique ou fonctionnelle. En premier lieu il reconnaît que les causes de l'aliénation sont des prédispositions héréditaires ou secondaires à des agressions externes (les émotions fortes). Mais Pinel ne croit pas à l'organicité cérébrale.
D'une certaine manière il s'agissait d'une théorie périphérique des émotions.

Dans la seconde édition revue de son "Traité médico-philosophique sur l'aliénation mentale" éditée en 1809, bien qu'il ne changea pas d'avis concernant la manie, sa classification des maladies mentales se réalisa finalement au niveau du comportement depuis la perturbation psychique la plus légère jusqu'à la plus grave; de telle façon qu'il commença par la simple mélancolie ou délire partiel "dirigé contre un seul but" qui précède la manie ou délire généralisé. Ensuite viennent la démence ou débilité intellectuelle généralisée. Enfin l'idiotisme qui peut être de naissance ou acquis.
Cette seconde édition comporte plus de deux cents nouvelles pages exposant son expérience à Bicêtre et à la Salpétrière. Il mit en évidence l'intérêt d'un traitement humain des maladies mentales alors appelé folie depuis les plus anciennes étude des maladies mentales. Il insiste sur les relations avec le milieu familial et les autres malades et le le rôle du médecin dans l'administration hospitalière, pour couper le cercle infernal de la persistance ou de l'aggravation de la maladie mentale.
Les traitements médicamenteux ayant pour lui une importance secondaire.

 

Membre de l'Institut en 1803, il fit partie des tous premiers récipiendaires de la Légion d'Honneur créée par Napoléon qui en 1805 le nomma Médecin consultant de l'Empereur.
Il servit l'Empire puis la Restauration qui le décora de l'Ordre de Saint-Michel en 1818;

En raison de son opportunisme politique il fut destitué de sa charge de professeur en 1822.

Les dernières années de sa vie furent assombries par le comportement de ses fils Scipion et Charles pour lesquels il paya des dettes.
Il subit ensuite des accidents vasculaires cérébraux successifs à partir de 1823, qui le précipitèrent peu à peu vers la démence artériopathique sénile, dont il mourut le 25 octobre 1826.

Pinel, pragmatique avant tout exerça une influence considérable sur l'organisation du traitement des aliénés. Bien qu'il ait initié le traitement psychologique, il démontra qu'il y a toujours des traces de raison chez un aliéné qui permet d'envisager une thérapeutique, le dialogue interrompu par la folie, dans la réglementation de l'institution hospitalière psychiatrique qu'on appelle "asile".