Jean-Martin Charcot est né le 29 novembre 1825 à Paris, son père est carrossier, sa mère est une toute jeune femme de 16 ans et demi.
En 1826, Pinel disparaît, lui qui venait de jeté les bases de la psychiatrie scientifique, la relève sera assurée!
Charcot étudiant
Jean-Martin Charcot poursuit ses études secondaires au lycée
          Bonaparte.
          Vers 1844, il décide de devenir médecin. En 1848 il est interne des
          Hôpitaux de Paris.
          En 1853 Charcot est nommé chef de clinique à la Faculté de médecine.
          Son maître, le Professeur Royer, le présente au banquier et futur
          ministre Achille Fould qui l’ emmmène en Italie.
          Médecin des Hôpitaux en 1856, il échoue au concours de l’agrégation
          en 1857.
          En 1860 il se présente pour la seconde fois à l’agrégation, il
          doit sa nomination à son érudition et à Royer.
1862-1882: Charcot à la Salpétrière
En 1862 il épouse une riche veuve dont il aura deux enfants, Jeanne et Jean-Baptiste. Cette même année il est nommé Médecin-chef à la Salpétrière dans le quartier “Vieilles-femmes.” Cet immense réservoir de “chroniques” est alors un vaste hospice de 5.000 âmes que Charcot avait déjà connu en 1852 pendant son internat. C’est là que se décide son orientation scientifique.
De 1862 à 1870 son enseignement à la Salpétrière
          est consacré aux maladies des vieillards.
          Sa contribution à l'étude de la physiologie et de la pathologie du
          système nerveux a été fondamentale, elle compte près de 700
          publications. En véritable neurologue, Charcot décrivit les aspects
          les plus typiques de certaines pathologies du système nerveux, comme:
          • en 1861-1862, il présente une observation de “paralysie
          agitante” connue sous le nom de maladie de Parkinson (1817).
          • en 1863 il présente des travaux d’anatomie-pathologique sur la
          goutte.
          • en 1865 ce sont des travaux sur la paraplégie douloureuse des
          cancers, sur l'anatomie et la physiologie du système nerveux, leçons
          encore sur les maladies du poumon, du foie, avec la description du
          lobule pulmonaire et du lobule hépatique, sur la pathologie des hémorragies
          cérébrales,
          • en 1868-1869 il s’intéresse à l’atrophie musculaire
          progressive des mains, pouvant s’étendre aux bras, aux jambes, aux
          muscles de la langue, du pharynx et du larynx. Pour l’étude de ces
          cas il recevait l’aide précieuse de Guillaume Duchenne, qui , bien
          que n’étant ni hospitalier ni universitaire, faisaient des
          recherches sur les stimulations électriques des muscles.
          Charcot pût décrire, avec son élève Joffroy, une maladie particulière
          au cours de laquelle le malade avait une sclérose des cordons latéraux
          de la moelle épinière (faisceaux moteurs) s'accompagnant, du fait
          des atteintes des cellules motrices de la corne antérieure, de l'
          amyotrophie citée plus haut. Il donna à cette maladie le nom de sclérose
          latérale amyotrophique, dite aussi, depuis, Maladie de Charcot.
          • La même année il fut le premier à donner une symptomatologie
          complète de la sclérose en plaques qu’il différencie d’avec la
          maladie de Parkinson.
          En 1867 naît son fils Jean-Baptiste Charcot. On a parfois reproché
          à Jean-Martin Charcot d’avoir orienté son fils Jean-Baptiste vers
          la médecine alors que sa vocation était la Mer. Celui-ci deviendra néanmoins
          organisateur d’expéditions océanographiques, et disparaîtra en
          1936 à bord du “Pourquoi pas?”
          En 1870, pendant le siège, Charcot interrompt ses travaux pour se
          consacrer aux malades atteints de la variole et de la typhoïde.
          En 1872 il est nommé à la Chaire d’ anatomo-pathologie de la
          Faculté.
          Aussi c’est avec la méthode qu’il appela anatomo-pathologique (études
          des symptômes lors de la maladie, puis des lésions à l’autopsie),
          qu’il poursuivit des travaux sur les localisations cérébrales: il
          put ainsi affirmer, concept nouveau à l’époque, que le cerveau,
          loin d’être homogène, était une association de territoires divers
          ayant des fonctions distinctes.
          Il continue à la Salpétrière ses leçons de clinique neurologique.
Ses qualités de conférencier lui valent d’être élu, en 1873, Membre de l’Académie de Médecine et Membre de l’Académie des Sciences en 1883.
1882-1893: Essor de l’École de la Salpétrière
En 1882 la faculté de Médecine de Paris crée pour Charcot une chaire de Clinique des maladies du système nerveux dans laquelle il accomplira une oeuvre immense, qui allait devenir la plus grande clinique neurologique d’Europe. Il sera en effet chef d’École et ses élèves s’appelleront A. Pierret, Joffroy, Paul Richier, Raymond, Brissaud, Gilbert Ballet, Pierre Marie, Bourneville, Bouchard, Gilles de la Tourette et Joseph Babinski, en sommes tous les grands neurologues et psychiatres français et étrangers. Le plus célèbre de ses étudiants, en 1885, fut Sigmund Freud, qui observe pendant quatre mois, à l'hôpital de la Salpétrière, les manifestations de l'hystérie, les effets de l'hypnotisme et la suggestion et tombe sous le charme du maître qu'il décrit en ces termes à sa fiancée : "Charcot, un des plus grands médecins et dont la raison confine au génie, est en train de démolir mes conceptions et mes desseins. La graine produira-t-elle son fruit, je l'ignore ; mais que personne n'a jamais eu autant d'influence sur moi, de cela je suis sûr." Il propose à Charcot de traduire certains de ses ouvrages en allemand : "Leçons sur les maladies du système nerveux" est publié en 1886.

Les leçons du mardi à la Salpétrière, qu’il fait devant les plus grandes personnalités parisiennes de la science, des arts et de la politique, et Léon Daudet décrit son hospitalité “fastueuse” ainsi que devant les neurologues du monde entier, resteront à jamais célèbres, ce sont des événements scientifiques et mondains.
La neurologie fut pour Charcot un des fondements de son activité de psychiatre. C’est dans ce domaine, et plus particulièrement dans celui de l’hystérie, et de l’hypnotisme, que Charcot s’attira tout un public non médical séduit par ce genre de phénomènes alors à la mode. C’est dans ses descriptions magistrales de l’hystérie que Charcot assit l’autorité de l’école de la Salpétrière. C’est dans ses méthodes d’hypnose qu’il la rendit critiquable.
La pédagogie de Charcot s'appuie sur la méthode
          anatomo-clinique qu’il a largement perfectionnée, ainsi que
          l'utilisation de techniques plus modernes, comme la pathographie ( équivalent
          écrit des manifestations corporelles).
          Charcot se sachant mauvais orateur, prépare longuement ses cours. il
          complète l'élaboration de son diagnostic, basé sur l'observation
          lente, minutieuse des malades, par la prise de clichés à tous les
          stades de l'observation, par des esquisses d'un mouvement, d'une déformation
          frappante, d'une contracture. Ces croquis se retrouvent dans les
          manuscrits de ses leçons qui sont agrémentées de tableaux
          synoptiques, de courbes, de la mise en évidence par Charcot lui-même
          des gestes caractéristiques de la maladie.
Parmi ses collaborateurs il choisit des personnalités
          appartenant aux disciplines philosophiques et se justifie en écrivant:
          “Jusqu'à présent, on s'est habitué à
          mettre la psychologie à part, on l'enseigne au collège, mais c'est
          une psychologie à l'eau de rose qui ne peut servir beaucoup. C'est
          une autre psychologie qu' il faut créer, une psychologie renforcée
          par les études pathologiques auxquelles nous nous livrons”
          Charcot est devenu un consultant national et international. Sa réputation
          de savant et de médecin est exceptionnelle.
L’Hystérie et l’hypnose
Sous son influence, la maladie mentale commença à être systématiquement
          analysée; et l'hystérie, à l'étude de laquelle Charcot se consacra
          depuis 1870, fut distinguée des autres affections de l'esprit. Il met
          au point la description de la “grande hystérie”
          et complète cette description par le recours à l'hypnose, comme
          moyen de reproduire expérimentalement la crise hystérique.
          Les techniques d'induction hypnotiques rappellent les moyens utilisés
          par les magnétiseurs.
          Entre Mesmer et Freud: on peut voir dans l’hypnotisme la forme la
          plus évoluée du magnétisme mesmérien. Dans les mains de Charcot,
          c’est un moyen d’ étude en vue de découvrir une base organique
          à l’hystérie.
          Charcot décrit trois phases successives à ce qu’il a appelé le
          grand hypnotisme ou la grande névrose hypnotique:
          • la léthargie, obtenue par compression des globes oculaires
          par exemple, elle se caractérise par par l’occlusion des paupières,
          l’ hypotonie des muscles et une vivacité des réflexes ostéo-tendineux.
          • la catalepsie, s’obtient par l’ ouverture des paupières
          du sujet, elle se caractérise par immobilité du sujet avec une
          hypertonie musculaire, abolition des réflexes ostéo-tendineux, une
          disparition de la volonté psychique et physique. Le sujet garde les
          yeux ouverts.
          • et le somnambulisme provoqué. Il est caractérisé par une
          hyperesthésie, une anesthésie à la douleur contraste avec une
          audition accrue, une très grande sensibilité aux odeurs et une
          hypermnésie. Les hallucinations visuelles sont intenses et précises.
          Il montra que les sujets étaient suggestio nables, qu’on pouvait
          leur faire accomplir des actes plus ou moins raisonnables:
          Utilisant l'hypnose comme moyen de traitement, Charcot induisait chez
          ses patientes une attaque hystérique qui répondait à ses normes.
          L'ennui, c'est que les patientes, comme ses collaborateurs, étaient
          plus enclins à confirmer les vues du maître qu'à mener une véritable
          recherche scientifique. 
          Mais Charcot entreprit aussi d’étudier l’influence des métaux et
          des aimants sur les phénomènes hystériques: ce furent la métalloscopie
          et la métallothérapie.
Les plus grandes critiques de ces méthodes vinrent de l’école
          de Nancy. Hippolyte Bernheim objecta à Charcot le caractère
          artificiel de son hypnotisme: “tous les phénomènes
          constatés à la Salpétrière…n’existent pas alors que l’on
          fait les expériences dans des conditions telles que la suggestion ne
          soit pas en jeu, les sujets ne les réalisent que lorsqu’ils savent
          qu’ils doivent les réaliser.”
          Il est indéniable que Charcot n’a pas fait preuve dans ce domaine
          de son objectivité et de sa prudence habituelles. Il est aussi
          probable que ses assistants aient leur part de responsabilité dans
          ces expériences spectaculaires et publiques. Brillants cliniciens,
          ils pensaient être observateurs, alors qu’ils ils étaient, au
          moins en partie, inducteurs des phénomènes hypnotiques.
          Par ailleurs, Babinski , un de ses fidèles élèves, reconnaît que
          Charcot "eut le tort de faire ses
          cliniques sur la grande hystérie et sur l'hypnotisme non seulement
          pour des médecins mais aussi pour un public non médical; ses leçons
          attiraient les gens du monde, des acteurs, des littéraires, des
          magistrats, des journalistes, des hommes politiques et quelques médecins.
          La présentation des sujets en état de léthargie, de catalepsie, de
          somnambulisme, de sujets présentant des crises violentes,
          ressemblaient trop à de la mise en scène théâtrale".
          Quoiqu’il en soit, Charcot, qui était sur le point de réviser entièrement
          ses conceptions au moment de sa mort, a apporté sa contribution dans
          un domaine encore mal connu. Freud qui fut son élève allait faire
          repartir la science dans une nouvelle direction.
En 1888 éclate le scandale de Panama qui allait durer dix ans. En
          1893 le banquier parisien Cornélius Herz se réfugie en Angleterre;
          il est arrêté à Bournemouth. Le gouvernement français ayant demandé
          son extradition, l’inculpé se prétendit malade. deux experts dont
          Charcot furent nommés pour en décider; après examen, ils conclurent
          à l’état grave de Herz et l’estimèrent intransportable.
          Ces conclusions qui ne répondaient pas au désir de l’opinion
          publique leurs valurent les attaques de la presse qui les accusa
          d’ignorance, de partialité et même de corruption.
          C’est trois ans plus tard que Herz fut condamné à cinq ans de
          prison pour chantage envers la Compagnie de Panama.
Froid, réservé, silencieux, Charcot était cependant doué d’un charme singulier. Sa notoriété, son autoritarisme, son allure distante devait fatalement lui attirer des inimitiés.
Le 16 août 1893, Jean-Martin Charcot meurt d’un œdème aigu du poumon au cours d’un voyage près du lac des Settons dans la Nièvre. A ses obsèques nationales, aux nécrologies dithyrambiques succède l'oubli de son oeuvre.
Durant vingt ans de 1873 à 1893, Charcot sera véritablement l’âme de la médecine moderne, formant d’ innombrables élèves auxquels il inculqua non seulement le goût de la méthode anatomo-clinique, mais aussi le goût de la médecine générale sans laquelle il ne saurait y avoir de bon médecin.


